Manger sainement
Il est bien connu que les personnes atteintes de la maladie coeliaque doivent éviter le gluten dans leur alimentation. Or, plusieurs études suggèrent que certaines personnes qui n’ont pas un diagnostic de la maladie coeliaque pourraient, elles aussi, ne pas tolérer le gluten.
En parallèle, on assiste à un engouement sans pareil de la part des consommateurs pour une alimentation sans gluten. Par conséquent, les produits « sans gluten » se multiplient sur les tablettes des supermarchés. Outre les patients souffrant de la maladie cœliaque chez qui ce type d’alimentation est tout à fait justifié, puisqu’il est le seul traitement, il est pertinent de se demander si des patients bénéficieraient véritablement de l’exclusion du gluten de leur alimentation.
Qu’est-ce que le gluten et où le retrouve-t-on?
Le gluten est composé de deux protéines, la gliadine et la gluténine. C’est la fraction prolamine du gluten qui pose problème chez les gens atteints de la maladie cœliaque et elle se retrouve dans le seigle, le blé, l’orge et le triticale (hybride du seigle et du blé). Cette protéine joue un rôle majeur dans la structure des produits de boulangerie et de pâtisserie.
L’utilisation intensive des céréales mentionnées ci-haut dans l’alimentation nord-américaine, principalement le blé, explique la taille du défi que représente l’élimination du gluten dans notre assiette. Le tableau suivant indique des sources de gluten et donne une meilleure idée de l’omniprésence du gluten dans l’alimentation nord-américaine.
Principales sources de gluten
Catégorie | Aliments à éviter |
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Sources de gluten | Amidon (fécule) de blé, All Branmd, Blé, Blé entier, Blé bulghur ou bulghour, Bulghur, Coucous, Chapelure (de blé), Croûtons (de pain), Épeautre, Extraits solubles de blé grillé, Farine (blanche, enrichie), Farine de blé, Farine d’épeautre, Farine de gluten, Farine Graham ou Graham, Froment, Germe de blé, Gluten, Huile de germe de blé, Kamut, Nouilles, Pâtes alimentaires, Pipil (blé concassé), Semoule, Semoule de blé, Son de blé, Spelt, Vermicelle, Avoine, farine d’avoine, Flocons d’avoine, Gomme d’avoine, Gruau, Oatrimmd (substitut de gras provenant de l’avoine), Son d’avoine, Ale, Arôme de malt, Bière, Bière bock, Bière en fut, Extrait de malt, Extrait d’orge malté, Farine de malt, Farine d’orge, « Lager », Lait malté, Larmes de job, Liqueur de malt, Malt, Nutrimmd( substitut de gras provenant de l’orge), Orge, Porter, Poudre de lait malté, Poudre de malt, Sirop de malt, Stout, Vinaigre de malt, Farine de seigle, Seigle, Seitan (mélange d’algues, de soja, d’herbes et d’une source de gluten)Triticale (blé+seigle)
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Sources possibles de gluten | Amidon, Amidon modifié, Chapelure, Croûtons, Dérivés de protéines végétales hydrolysées, Dextri-maltose (glucides fabriqués à partir d’amidon pouvant provenir du blé), Dextrine, Extrait de protéines végétales hydrolysées, Maltitol, Malto-dextrine (glucide fabriqué à partir d’amidon pouvant provenir du blé), Maltose, Nouilles, Pâtes alimentaires, Poudre à pâte*, Protéines de plantes hydrolysées, Protéines végétales, Protéines végétales hydrolysées (PVH), Protéines végétales texturées, Sauce soja, Semoule, Sirop de riz (certains sirops de riz sont fabriqués à l’aide d’une enzyme à base d’orge), Sirop inverti, Shoyo, Son |
À noter que les sources possibles de gluten sont des ingrédients susceptibles d’indiquer la présence de gluten. Pour valider d’information, il vaut mieux communiquer directement avec les compagnies.
Jusqu’à présent, il n’y a aucune preuve scientifique qui démontre qu’une diète sans gluten peut être appropriée chez les personnes qui ne sont pas diagnostiquées avec marqueurs sérologiques positifs (présence d’anticorps) et/ou altération de la membrane intestinale.Dès lors, le retrait du gluten de l’alimentation dans le but de prévenir ou de se protéger contre le développement éventuel de la maladie coeliaque ou d’autres formes d’intolérances au gluten semble jusqu’à présent non fondé.
Toutefois, dans le cas où les tests sérologiques sont positifs, et ce même si la membrane intestinale n’est pas altérée et que la personne n’est pas diagnostiquée avec la maladie coeliaque, il est recommandé de suivre un régime sans gluten.
Méthodes diagnostic
Actuellement, le diagnostic de la maladie cœliaque s’effectue en deux étapes; l’évaluation sérologique et les biopsies duodénales.
L’évaluation sérologique
Il existe plusieurs tests sanguins qui permettent de tester les anticorps présents dans le sang, dont les immunoglobulines IgA (anticorps endomysium (EMA) et anti-transglutaminase (tTG)) qui sont les plus spécifiques et les plus utilisés dans les laboratoires. La sensibilité et la spécificité de ces tests varient selon les laboratoires, mais se situeraient entre 95% et presque 100% et seraient plus élevées que pour les autres tests.
Les biopsies duodénales
Bien que l’évaluation sérologique à l’aide du dosage IgA ait une forte valeur prédictive, le diagnostic nécessite tout de même une biopsie initiale afin d’établir si des altérations de la membrane sont présentes alors que le patient suit une diète normale ainsi qu’une deuxième biopsie démontrant que les lésions se sont améliorées après l’adoption du régime sans gluten.
L’intérêt de la diète sans gluten chez les patients non-coeliaque
Tel que décrit précédemment, la diète sans gluten est le traitement de choix pour les personnes souffrant de la maladie cœliaque. Toutefois, au cours des dernières années, des études indiquent que l’exclusion du gluten de l’alimentation apporterait des bénéfices à plusieurs autres maladies qui tombent dans le spectre de la sensibilité au gluten ou de l’intolérance au gluten.
L’intolérance au gluten et sensibilité au gluten
Les personnes souffrant de la maladie coeliaque sont, par définition, intolérantes au gluten. Toutefois, les gens intolérants au gluten ne sont pas nécessairement coeliaques, par exemple dans le cas où la muqueuse intestinale n’est pas atteinte. Si les tests sérologiques sont positifs, qu’il n’y a pas d’altération de la membrane intestinale et que les symptômes disparaissent après le retrait du gluten dans l’alimentation, ces personnes pourraient être identifiées comme intolérantes au gluten.
Toutefois, au cours des dernières années, les experts dans ce domaine ont observé un nouveau syndrome : certaines personnes aux prises avec un côlon irritable présentent également une sensibilité au gluten. Ces personnes n’ont donc pas les gènes associés aux intolérances au gluten, et les tests sérologiques s’avèrent également négatif.
Néanmoins, ces personnes voient leurs symptômes s’améliorer avec une diète sans gluten.
Qui devrait passer le test de dépistage de l’intolérance au gluten?
- Les personnes qui, parmi les membres de leur famille, ont la maladie coeliaque, ou qui ont des symptômes de la maladie coeliaque.
- Les personnes qui souffrent de :
- Anémie ferriprive
- Diarrhée chronique
- Gonflement, gaz et douleurs abdominales chroniques.
- Croissance anormale chez l’enfant
- Fatigue chronique
- Infertilité
- Perte de poids inexpliquée
- Les personnes ayant développé une maladie auto-immune (ou des membres de leurfamille) :
- Diabète de type I
- Thyroïdites auto-immunes
- Les personnes ayant un diagnostic de:
- Dermatite herpétiforme
- Syndrome du côlon irritable
Les personnes qui ont un ou des membres de leur famille atteints de la maladie cœliaque ont une plus grande disposition à développer cette maladie. En effet, la prévalence est jusqu’à 25% plus grande chez ces personnes et augmente avec le partage des gènes HLA de prédisposition et avec l’âge.
Le danger de l’autodiagnostic
À l’heure actuelle, plusieurs personnes croyant souffrir d’intolérance au gluten tentent d’emblée l’adoption d’un régime sans gluten. Cette modification de l’alimentation peut paraître logique et sans impacts majeurs, mais elle peut compliquer largement la tâche du médecin. En effet, pour diagnostiquer l’intolérance au gluten, il doit d’abord y avoir un dosage sanguin pour vérifier la présence d’IgA anti-transglutaminase.
Si le test est positif, on procède à une biopsie pour vérifier s’il y a bel et bien aplanissement de la membrane de l’intestin. Or, tel que mentionné précédemment, le régime sans gluten permet le rétablissement à la fois du taux sanguin d’IgA antitransglutaminase et de la membrane intestinale. La personne ayant changé son régime avant d’entreprendre ce genre de tests pourrait recevoir un diagnostic de faux négatif.
De plus, l’auto diagnostic peut comporter des risques pour la santé. Selon le Dr Joseph Murray, gastroentérologue à la clinique Mayo et auteur de plusieurs publications sur le gluten, les personnes sans diagnostic officiel et qui s’auto proclament intolérantes au gluten, pourraient ne pas être investiguées pour un problème gastro-intestinal plus grave. Ce spécialiste cite en exemple une personne qui se sent mieux pour un certain temps après avoir cessé le gluten, mais qui, en réalité, souffre sans le savoir de la maladie de Crohn, d’un ulcère gastrique, ou pire encore, d’un cancer du côlon.
Le régime sans gluten; souvent peu nutritifs
L’engouement pour le régime sans gluten n’est pas sans conséquence, surtout pour les gens qui n’ont pas la maladie coeliaque ou qui ont un test sérologique négatif. En effet, plusieurs produits sans gluten sont de faible valeur nutritive, pauvres en fibres, vitamines et minéraux. Il n’est pas rare qu’un produit régulier avec gluten contienne le double de l’apport en fibres, en plus de coûter jusqu’à quatre fois moins cher. D’autre part, plusieurs personnes, principalement des femmes, entreprennent une alimentation sans gluten dans l’espoir de perdre du poids. Une élimination radicale de la plupart des produits céréaliers, ainsi que d’une variété de produits transformés renfermant du gluten peut effectivement mener à une perte de poids mais aussi à certaines carences nutritionnelles.
Il est d’autant plus important de communiquer aux personnes concernées que le régime sans gluten demeure un traitement sérieux et restrictif qui se doit d’être suivi correctement. Par conséquent, des consultations avec un médecin et un nutritionniste sont fortement recommandées.